Les spots des vingtième et vingt-cinquième anniversaires de Disneyland Paris faisaient dialoguer en 2012 et 2017 l’expérience éblouissante et les nouveautés de l’offre. En 2012, les personnages envahissaient les villes et les parcs. En 2017, le catalogue renouvelé mettait en avant son innovation immersive et spectaculaire. L’accumulation et la saturation laissent place en 2022 à l’idée de continuité, à la fois par le texte (« la magie se construit avec vous ») et par l’image (revue chronologique des classiques Disney que le parc a accompagnée dans ses défilés et attractions).
Cet article explore deux aspects de cette continuité mise à l’honneur dans la promotion publicitaire du trentième anniversaire de Disneyland Paris : la transmission intergénérationnelle et la permanence du regard.
La tradition des liens entre les générations
Les liens entre les générations n’ont jamais été exclus de l’imaginaire publicitaire de Disneyland Paris. Ceux-ci révèlent un positionnement marketing familial qui, s’il est peu original pour un parc d’attractions, ont pris alternativement chez Disneyland Paris les formes qui lui sont propres de la régression et de la communion.
Le pouvoir régressif du parc était présent dès les premières années du parc dans la célèbre publicité du grand-père et revenait en 2017 dans les promotions du billet adulte au tarif du billet enfant. La fusion était aussi à l’honneur dans les publicités des 25 ans : les enfants et les parents communiaient dans une même expérience de l’éblouissement.
L’intergénérationnel renouvelé par le rôle du lieu
En 2022, le lien familial prend une nouvelle forme à travers la transmission intergénérationnelle qui épouse avec fluidité, sans ruptures, les évolutions du lieu. La publicité des 30 ans commence par un plan où un jeune garçon s’émerveille devant la parade. Celle-ci, en tant que forme de spectacle jamais interrompue au sein des parcs, joue le rôle de machine à voyager dans le temps et dans les productions Disney. La publicité se termine alors sur le même garçon, devenu adulte, tout aussi émerveillé, accompagné de son propre enfant.
Le parc continue à vivre grâce à cette transmission de l’adulte à l’enfant, autant que cette transmission est permise par les évolutions de l’offre du parc, illustrées dans cette parade transformée en voyage dans le temps. La maturité acquise après 30 ans d’exercice ouvre l’opportunité de valoriser le parc comme artisan d’un lien social et d’un attachement ancré profondément dans les pratiques. Disneyland Paris se positionne alors en haut-lieu du renforcement des liens familiaux et grave dans le marbre la fidélité du parc à l’univers Disney en général. Cette fidélité était déjà perceptible dans des publicités narratives telles que le film du caneton de Noël 2018.
La permanence du regard dans l’expérience
Les publicités des 30 ans, tant dans les films que sur les affiches, continue de mettre à l’honneur le rôle du regard. La fonction de ruban temporel adoptée par la parade se complète d’un arrêt sur image de l’espace : la caméra semble tournoyer à travers une photographie figée. On y voit un signe de l’unité cimentée de la promesse du parc et d’une expérience onirique, montrée en contexte nocturne, qui prend place hors du temps et de l’espace. Le parc se fige dans son existence pérenne, autonome par rapport au monde extérieur. Il demeure toutefois en mouvement dans ses battements de cœur internes. L’objectif dynamique de la caméra est comme du sang coulant dans les veines du parc.
Les enfants et des adultes de la publicité tournent leur regard vers le parc, dans une somme d’intimités vécues ensemble. On peut comprendre en filigrane que l’adulte et l’enfant ne s’arrêtent pas sur les mêmes éléments de la parade, attachés à des époques différentes. La nouveauté de cette publicité par rapport aux représentation précédentes de ces regards est donc la fixité. Sur le plan symbolique, le pouvoir du parc est représenté par l’étincelle qui traverse la monture des lunettes du garçon et passe donc par les yeux. A travers cette étincelle, le regard devient la caution humaine de la continuité matérielle du parc, représentée quant à elle par le fil conducteur de la parade.
Le regard et la parade, l’humain et l’espace, se placent ainsi dans une communion qui valorise le poids du souvenir construit et revécu dans l’expérience du parc. Dans la tradition disneyenne de la matérialisation des rêves, le lieu reflète et augmente l’activité de l’esprit. Cette dimension merveilleuse et surnaturelle de l’expérience s’accompagne d’un fond musical rempli des tonalités mystérieuses de la découverte rejouée.