Révélé dès son premier film, Bons baisers de Bruges, le réalisateur Martin McDonagh se fait connaître du grand public en 2017 avec la sortie de l’excellent Three Billboards : Les Panneaux de la Vengeance. Thriller haletant aux personnages forts et marquants, il nous emmène en même temps au cœur du Missouri, au plus près de ses habitants et de ses paysages. Succès au box-office, le film remporte deux oscars et quatre Golden Globes. Cinq ans après ce succès, Martin McDonagh nous invite à Inisherin, une île irlandaise fictive, à l’écart de la guerre civile qui a sévi à la fin du XXème siècle.
Le pitch de base est à la fois déroutant et simple. Colm (Brendan Gleeson) décide du jour au lendemain de ne plus parler à Pádraic (Colin Farell), pourtant meilleurs amis de longue date, puisqu’il le trouve finalement creux et inintéressant. Cette décision va surprendre tous les habitants du village, qui auront chacun des réactions différentes. Les relations entre les personnages sont particulièrement bien ficelées. D’abord, le duo (ou duel) Colm/Padraic va nous faire passer par de nombreuses émotions, de l’humour à l’horreur. Chaque personnage du film va ainsi rajouter une couche de gravité à l’histoire qui prendra petit à petit une tournure de descente aux enfers. Tandis que la factrice commère va être drôle, le vilain petit canard de l’île va davantage nous provoquer de la peine. D’un seul coup, on vit dans ce village irlandais, avec ses personnages brisés, ses animaux attachants et son ambiance si froide.
L’autre point fort des Banshees d’Inisherin est son immersion totale en Irlande. A la fin du film, on ressort de cette séance avec la sensation d’avoir voyagé loin de chez soi. On est en effet plongé du côté des personnages pendant près de 2 heures, on vit leur quotidien rural et rustique, totalement figé dans le temps. Sans forcément être émerveillé par cet environnement, les côtes irlandaises sont omniprésentes et deviennent des paysages presque contemplatifs.
Malgré des décors et des personnages réussis, il est clair que Les Banshees d’Inisherin ne plaira pas à tout les publics. Le rythme lent et l’ambiance froide ennuieront certains. Pour ma part, la tension et la rivalité grandissante entre les personnages m’ont totalement transporté et le climax est très réussi. Ainsi, entre les déchirements, la violence et la vie difficile de cette île, on retrouve finalement de la chaleur dans chaque personnage. C’est d’ailleurs ces mêmes thèmes qui ont fait le succès de Three Billboards, le premier film du réalisateur.
