Pub 2020 de Disneyland : la magie est un jeu d’apprenti sorcier

Le nouveau film publicitaire de Disneyland Paris destiné à la télévision et publié sur la chaîne Youtube officielle le 18 février redistribue les cartes de ce à quoi le resort nous a habitués. Cette publicité ouvre un autre regard sur l’expérience du parc et sa mission. Enfin, on y lit, cette fois-ci conformément à chaque publicité du parc, une certaine définition de la magie. 

Une structure inhabituelle

Cliquez d’abord ici pour voir le spot.

La publicité ne fait part d’aucune nouvelle attraction et en promeut pour la moitié les plus anciennes, comme Phantom Manor, Pirates des Caraïbes, Big Thunder Mountain et Mad Hatter’s Tea Cups. La nouveauté n’est donc pas dans le contenu du spot qui n’a rien d’autre à offrir que des promotions suggérées en toute fin (“offres de rêve”) et un état d’esprit. 

Cet état d’esprit renouvelé repose sur un changement de structure. La séquence, totalement montée en images de synthèse, ne raconte pas d’histoire et ne montre pas de plans réels du parc. La publicité des 25 ans de 2017 enchaînait des plans de différentes familles mais proposait une continuité temporelle, de l’arrivée euphorique du matin à l’émerveillement du soir. Le caneton de 2019, ainsi que le remake de l’ouverture du Roi Lion la même année se fondaient respectivement sur le modèle de productions Disney.  

Une esthétique de l’allusif

Dans l’esthétique, la publicité révèle une familiarité avec des formats médiatiques récents de la communication “fait-maison”, issue de tendance virales et amatrices. Par exemple, le plan-séquence de la publicité est proche du lipdub et du mannequin challenge, respectant le principe d’une caméra cheminant sur un parcours sans aucune coupe ni raccord. Les fonds et filtres Snapchat, les pratiques de cover sur Youtube et Tiktok semblent aussi des inspirations pour le format de ce spot publicitaire. On y reconnaît aussi, dans une certaine mesure, le point de vue du jeu vidéo. La conclusion qu’on en tire est la valorisation d’une expérience de l’à peu près, de l’allusion, inspirée par des marqueurs personnels, à la manière du scrapbooking, que l’application One Note a digitalisé. 

La deuxième remarque inévitable sur l’esthétique est le lien établi par le choix du thème de L’apprenti sorcier de Paul Dukas de 1896, repris dans la scène la plus célèbre de Fantasia. Ce film, révolutionnaire en 1940, négligé par le public et qui n’avait reçu de critiques positives que du monde artistique, faisait se rejoindre le dessin-animé, art populaire, et la musique classique, art noble (dans les hiérarchies de l’époque), en faisant vibrer le dessin au rythme de la musique. Cet esprit est repris dans la publicité : les visages des personnages au début se meuvent en rythme, le bateau frappe l’eau dans un fracas instrumental, le feu d’artifice explose avec l’apogée mélodique, etc. L’ambiance mystérieuse et fantastique des films Disney des années 1940 et 1950 ressort donc dans la représentation du parc. Cette représentation sera l’objet de la suite de l’article.  

Regards sur le parc

Au niveau du sens, chaque publicité donne une conception du parc et d’une manière de le pénétrer. Ici, il n’est pas un film Disney dans lequel on plonge, ni un livre d’histoire qui prend vie, mais une ligne droite ponctuée de sensations : jets d’eau, feu d’artifice, chutes libres, tourbillons d’objets.

L’expérience du parc se montre sur un mode métaphorique et esthétique, où règnent l’icône et l’indice. Les tasses, le bateau, l’ascenseur, sont des allusions à des attractions, mais ce n’est pas une évidence pour qui ne connaît pas les parcs. L’effet kaléidoscope qui s’en dégage rappelle le terrier d’Alice au Pays des merveilles, dans lequel elle s’engouffre et côtoie toute une série d’objets, dans une apesanteur à l’épaisseur alternative. Dans cette suite de logos et de traces, comme des souvenirs dont il ne reste que l’écume, nous avons bien l’esprit d’un carnet d’activités mais a-t-on encore la traduction d’une ambiance ? 

Cette métaphore permanente peut être lue aussi comme l’expression du slogan final : “Que serait le monde sans magie ?”. Comme à Noël où Disneyland s’affichait comme le foyer originel de la magie des fêtes, le parc est encore une fois le foyer indispensable et nécessaire de la magie. Le slogan est à lire, surtout apparaissant à la fin, comme : “Que serait le monde sans Disneyland ?”.

La magie : un jeu d’enfant 

Au sujet de cette magie, les publicités récentes déjà citées en donnaient des définitions possibles. Dans le film du caneton, la magie est la rencontre d’une ambition personnelle et du héros qui l’a transmise, de l’univers Disney et de son fan, dans un trajet de héros “pop”. Dans la publicité du Festival du Roi Lion, la magie est le pouvoir de transfert spatio-temporel opéré par le parc, qui plonge le visiteur dans un rôle et fait vivre le film. La publicité de Noël de 2019 montrait la magie comme un savoir-faire ancestral et secret, concrétisé par une poudre étincelante. Pour les 25 ans, la magie était l’étincelle dans les yeux que procurait la saturation de tous les sens.

Dans cette publicité, la question de la magie soulève l’enjeu de l’action et de la passivité. D’où vient le pouvoir de la magie ? L’adolescente est entraînée sur une piste, en est surprise, subit la crainte et l’imprévu. Elle alterne les moments de joie, d’appréhension et de complicité face à l’univers qui l’entoure. En même temps, elle déclenche aussi les événements en battant des bras et en se déplaçant, en semblant offrir un spectacle au spectateur qu’elle regarde. 

Cette coprésence montre une image de l’aventure qui surgit en claquant des doigts, à l’aide d’un “abracadabra” d’apprenti sorcier. Le jet de Spider Man ressemble en effet à un brandissement de baguette magique. Cela se passe sans risque : même pas peur, le personnage tourne le dos à ce qui se passe.  En même temps, cette position dos aux événements est le signe d’une confiance et d’une maîtrise, d’une assurance. Les images qui défilent derrière le personnage s’enchaînent comme des accumulations de souvenirs derrière elle (un scrapbook, encore !) 

Le rôle symbolique de Mickey

Difficile d’évoquer la magie sans parler à nouveau de L’apprenti sorcier. Toute pleine d’assurance, le personnage serait-elle comme Mickey une ambitieuse qui veut jouer à l’adulte trop vite ? Contrairement à Mickey dans la séquence animée de Fantasia, les parcs permettent de vivre l’aventure en toute sécurité, nous dit la brochure.   

Enfin, c’est Mickey qui orchestre à présent. Ce sont ses mains qui ouvrent et ferment la séquence, comme s’il était le déclencheur du parcours mystérieux qui se déroule. Il n’est plus l’apprenti mais le sorcier expérimenté ! Il est donc difficile de dire si le visiteur acquiert, par la présence de ces mains gantées, la force de Mickey ou s’il devient au contraire son objet traîné d’une expérience à une autre. Les mains de Mickey tendent à devenir l’icône de la magie. C’est le cas de l’affiche publicitaire de Noël, où le Père Noël se voit pousser avec étonnement les grosses pattes à quatre doigts, aussi connues que les oreilles. Contrairement à ses oreilles, les mains de Mickey apportent symboliquement un aspect artisanal, constructif et artistique. Cet aspect relance encore l’ambiguïté sur la passivité / action dans la représentation de l’expérience des parcs.

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