Marier la peur et le rire à Halloween : la quadrature du cercle ? Daily Disneyland vous a déjà présenté le programme de la saison d’Halloween et les déceptions qu’elle a générée du fait du poids du 25ème anniversaire qui a terni la qualité de la conception : https://www.dailydisneyland.com/avis-saison-dhalloween-2017/ Je vais me concentrer pour ma part sur une des affiches publicitaires qui ont promu cette saison née en 1997. L’affiche présente l’allée qui mène au château décorée aux couleurs d’Halloween. Nombreux sont les visiteurs qui se sont plaints de ne pas avoir trouvé dans le parc les mêmes décorations sur Main Street, les décors étant réservés à Frontierland : l’ambiance automnale permanente avec ces pins et ces tons ocres ou orangés y est particulièrement adaptée. Disneyland Paris est coutumier de ce « mensonge » : le château est devenu le symbole du seuil qu’on franchit dès les premières publicités avant même 1992. L’affiche d’Halloween annonce une « Fête démente ». L’adjectif « dément » est étonnant. Peut-être a-t-il été choisi pour sa proximité sonore avec le mot « démon » qui rappellerait l’esprit diabolique d’Halloween. En latin, le « dément » est quelqu’un qui a littéralement perdu l’esprit. En psychiatrie, la démence se réfère à un affaiblissement des fonctions intellectuelles et, dans le langage courant, à de la bizarrerie. Par extension, « C’est dément » a pu vouloir dire « C’est génial », « C’est dingue », « C’est incroyable ». C’est dans cette dernière acception populaire et ironique qu’il faut lire ce qualificatif qui permet d’envisager une forme de plaisir dans la folie. Il est possible que « dément » traduise ici le faux ami « terrific » en anglais. Ainsi, cette fête démente reprend le thème d’HalLOLween en 2016 à Disneyland Paris, en associant la peur et le rire (voir un précédent article sur la saison 2016 : https://johansdreamworlds.wordpress.com/2016/10/24/les-parcs-a-theme-et-halloween/). Avoir choisi Dingo pour une fête démente n’est pas non plus anodin : Dingo n’est pas le plus intellectuel des personnages Disney ! Le côté festif sur l’affiche est transmis par les serpentins et les cotillons, ainsi que par le déguisement de Dingo et les crânes moustachus qui humanisent la mort. Comment ne pas se souvenir de la danse macabre des Silly Symphonies des débuts de Walt Disney ? La danse macabre est un motif fréquent au Moyen-Âge et repris à l’époque romantique : elle rend supportable la mort et, dans le célèbre poème de Baudelaire, rappelle la présence de nos crânes sous nos peaux même dans les moments de fête où on célèbre la vie : ” Fiers mignons, malgré l’art des poudres et du rouge, Vous sentez tous la mort ! Ô squelettes musqués » L’expression « Squeletoons Party » pourrait être une tradition exacte de « Danse macabre », à la sauce Disney puisque ce jeu de mot associe la joie à la mort, le dessin animé léger au motif des squelettes. On a beaucoup parlé des décors « mexicanisants » de Frontierland à l’occasion de la sortie de Coco, dernier Pixar en date. Il n’y a qu’à regarder la bande-annonce de ce dessin animé pour comprendre le lien qui s’établit avec Halloween : le jeune garçon découvre qui il est et apprend à croire en ses rêves en côtoyant ses ancêtres décédés. La mort doit donc être vécue de manière positive car on ne meurt jamais pour rien : nos ancêtres nous rattachent au quotidien à des racines qui nous remplissent de confiance (lire ici la critique du film de Robin sur Daily Disneyland : https://www.dailydisneyland.com/coco-notre-critique/). Le site internet regorgeait donc d’oxymores associant le rire et la peur : « tourbillon de frissons et de rires », « moment joyeusement diabolique », « Préparez-vous à des rires et des frayeurs », « décorations déjantées et effrayantes ». Rendre positifs les motifs habituellement associés à la mort ou au mal a été également la mission de la maquilleuse Vanessa Davis qui a proposé une gamme colorée et élaborée de « make-up designs » à l’occasion de la fête des morts. Disneyland Paris confirme sa tendance à la peoplisation et sa volonté de se rapprocher du modèle qualitatif du luxe.
Blogueur et Fondateur de Daily Disneyland.
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